Repenser l’affichage environnemental :
doit-on sortir de l’ACV pour favoriser l’écoconception ?
De la question de la Norvège… jusqu’à Fernand Braudel !
(Pour les initiés : AE ! AES ! EDS ! EC ! ACV ?)
Vous ne connaissez par Norrøna, le Patagonia norvégien ? A vrai dire, moi non plus… du moins, depuis un mois, un peu plus.
Que s’est-il donc passé en Norvège, pour que cette marque devienne, petit à petit ,plus connue dans les champs de l’écoconception, de l’ACV et de l’affichage environnemental, et agite le microcosme français dédié à l’expérimentation dite XTEX pour le secteur textile habillement ?
En fait beaucoup et pas grand chose.
https://www.just-style.com/news/hm-group-norrona-under-fire-in-norway-over-environmental-claims/
Pas grand chose, car cette entreprise, est depuis 1929 un des symboles de l’habillement engagé, et formellement depuis 2015, date de la feuille de route RSE ; la démarche parle d’elle-même, avec notamment, pour ses produits en coton, 100 % de coton issu de l’agriculture biologique.
https://www.norrona.com/fr-FR/a-propos-norrona/histoire/)
Beaucoup, car, pour mieux marteler la performance de ce choix (avec une consommation eau de – 87 % par rapport au coton conventionnel), Norrøna a utilisé, comme beaucoup de marques mondiales, des données issues du Higg Index, démarche d’ailleurs très bien expliquée sur son site.
https://www.norrona.com/fr-FR/a-propos-norrona/responsabilite/higg/
Oui mais, des données génériques, est-ce une bonne idée pour comparer des produits ?
Réponse de l’Autorité Norvégienne de la Consommation : non car (en résumé) :
- les éléments chiffrés au consommateur doivent être vrais, précis et descripteurs du produit,
- les données doivent être à jour,
- les allégations doivent être construites en « cycle de vie« .
A ce stade, on se dit qu’une ACV (ou analyse de cycle de vie) suffirait… et bien, encore un non car il manque :
- des données spécifiques géographiques (pour éviter de donner une qualité écologique générale à des conditions de production parfois variables),
- des données liées au management sur site,
- des données sur les autres impacts, dont la biodiversité (dont on maîtrise mal les éléments dans l’ACV)…
Comment éviter une décision similaire en France ?
Il faut tout simplement revenir à des données :
- spécifiques,
- mesurables,
- vérifiées.
L’ACV, méthode poids lourd de l’écoconception, va-t-elle devenir un poids mort ?
En tout cas, les travaux du Higg sont stoppés, et même le NY Times s’est fait l’écho de l’affaire :
La Norvège parle de géographie, je concluerai donc par la géo-histoire de Fernand Braudel, qui a distingué 3 temps, liés :
1. la longue durée,
2. le temps des sociétés dans leurs dimensions économiques et sociales,
3. le temps événementiel, considéré comme « la couche brillante et superficielle de l’histoire ».
Dans notre contexte, voici :
1. Les objectifs de développement durable (ODD)
2. La demande des Etats, l’offre des entreprises
3. Le choix du consommateur, la mode…
Il semble aujourd’hui difficile, sans médiation, de passer des ODD à la consommation (du moins avec plusieurs indicateurs avérés)… Il semble désormais très improbable de recommander une approche 100 % ACV (sauf à repartir pour des années d’études).
Finalement, ce cas norvégien, vient peut-être de nous faire gagner beaucoup de temps pour mieux tenir compte… du temps long !
Plutôt intéressant pour une entreprise qui a presque 100 ans…
…et plutôt intéressant pour l’Etat Français qui doit mettre en œuvre la Loi Climat et Résilience (et l’affichage environnemental)… dans les prochains mois !